En guise d’introduction à la petite histoire du Séminaire, voici la reproduction d’un article rédigé par Louis-de-Gonzague Belzile, alors notaire à Rimouski, publié dans le Numéro-Souvenir de La Vie Écolière à l’occasion de son Jubilé d’argent le 1er juin 1936.
De tous les souvenirs de ma vie de collège, plusieurs sont restés vivaces, et il suffit de me pencher sur mon passé pour les revivre mélancoliquement; mais aucun n’offre à la génération actuelle des collégiens autant d’intérêt que celui de la fondation, bien avant celle de la Vie écolière, d’un hebdomadaire au Séminaire; je veux parler du journal le Jeudi.
C’était en 1892. J’étais finissant. La préparation des examens du baccalauréat ne nous causait pas alors des cauchemars irrépressibles et même nous laissait quelques losirs. L’activité des collégiens, bienfaisants ou malfaisants, est proverbiale; celle du Père Sam. Bellavance, mon confrère était seulement bienfaisante. Il voulait un journal et il me demanda de travailler avec lui à sa fondation. Je ne saurais dire ce que cette entreprise nous coûta d’efforts pour la mener à bonne fin, car il ne me reste qu’un agréable souvenir de ce travail.
Notre projet fut soumis à la Société Saint-Louis de Gonzague à sa séance du 26 mars 1892 et fut adopté avec enthousiasme. Le Père Bellavance fut nommé rédacteur en chef et moi-même administrateur.
Le premier numéro paraissait le 31 mars 1892 à deux cents copies. Il était entièrement polycopié et c’était Charles-Borromée Beaulieu, maintenant chanoine titulaire de la cathédrale de Rimouski, « une belle main d’écriture » , qui l’avait entièrement composé au sens typographique du mot.
L’abonnement n’était que de dix sous par année. Mes fonctions d’administrateur ne furent jamais compliquées; cependant, même en ce temps-là, la perception était difficile et je trouve dans un numéro un avis aux abonnés retardataires de bien vouloir acquitter leurs arrérages d’abonnement; c’était tout de même l’heureux temps.
Nous passions tous nos jeudis à ce travail, dans une salle de classe et une franche gaieté.
Notre journal fut publié chaque semaine jusqu’au 23 juin 1892 où parut le douzième numéro; ce fut le dernier; le chiffre treize lui fut-il fatal?
Ce journal relatait les menus incidents de notre vie collégiale, avait de grands articles de fonds! et même d’humour: c’est ainsi qu’un de nos collaborateurs, dès 1892, avait lancé le projet de fermer le Détroit de Belle-Isle au moyen d’une digue gigantesque qui aurait détourné le cours des glaces du Groenland et nous aurait donné un climat tropical, grâce au Golf Stream. Ce projet n’a pas encore été réalisé, mais a-t-il jamais été abandonné? Nous y trouvions également des vers et même de la musique: Zulski y avait publié une mélodie, malheureusement oubliée, intitulée « Le ciel Natal ».
Comme toutes ces choses sont loin! mais il fait d’autant plus plaisir de les rappeler que l’exergue de notre journal était « Haec olim meminisse juvabit ».
L . de G. Belzile, notaire Rimouski